Grande figure debout

Grande figure debout

1944-1947, huile sur toile, 200 x 100 cm
Coll. Musée L, Louvain-la-Neuve (donation Serge Goyens de Heusch)
N ° inv. 196

Alors que Gaston Bertrand éprouva peu d'attirance pour Matisse, le peintre belge ne se prive pourtant guère d'une dimension décorative si l'on considère sa Grande figure debout amorcée en 1944, mais signée trois ans plus tard, après divers remaniements dont le plus spectaculaire consiste en l'effacement des traits d'un visage devenu triangle bleu. Il s'agit d'une toile étonnante, la première d'importance à appartenir vraiment à la galerie des «figures emblématiques ». Par la tonalité dominante basée sur le rouge, dialoguant ici avec les signes bleus et des arabesques blanches, par la fusion de la silhouette anonyme (inspirée cependant du grand portrait de la mère de l'artiste peint en 1940) dans la texture du fond, le peintre ambitionne un puissant schéma décoratif et tente, selon son aveu, d'évoquer le sentiment désolant de délabrement mental et matériel dû à la guerre : « C'est le résumé du climat de souffrance, de misère et de négation dans un quartier pauvre de Bruxelles sous la botte allemande », nous expliqua le peintre à propos de cette toile qu'il tenait pour essentielle dans l'évolution de son art.

Si devant de telles œuvres, la critique parla volontiers d'expressionnisme, de cubisme, voire même de surréalisme, Bertrand ne se montra toutefois l'émule d'aucune de ces esthétiques modernes : dans la solitude de sa création, il n'eut aucune peine à soumettre les leçons qu'il avait choisies de se donner à l'authenticité de sa propre vision. Une telle détermination intérieure, une telle volonté d'indépendance, liée à une invention formelle aussi personnelle, ne manquèrent point d'impressionner l'entourage du peintre, et même d'influencer l'évolution plastique de plusieurs de ses compagnons de la Jeune Peinture Belge.

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